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Vers un budget de rupture

Le régime politique de Macron vient de connaître ses “Trois Glorieuses”. Journée du 25 septembre, lancement à Matignon d’un grand plan d’investissement intelligent. Journée du 26, déclaration présidentielle en Sorbonne sur la refondation de l’Europe. Journée du 27, présentation à Bercy d’un budget constructif pour 2018. L’analogie avec Louis-Philippe et la Monarchie de Juillet de 1830 s’arrête là. Mais ce sont bien trois Journées révolutionnaires pour le train-train économique hexagonal. Une fiscalité du capital alignée sur celle des concurrents de proximité et non plus sur celle du travail en est l’emblème. La bataille de l’opinion autour de la comptabilité de caisse C’est sur le terrain que le pouvoir gagnera ou perdra la bataille de l’opinion. Il y a là de quoi réveiller tous les adeptes de la comptabilité de caisse ! Ils sont légion en France. Ils qualifient de libéral tout ce qui peut dynamiser une organisation productive. Ils font des calculs qui se limitent à combien pour les riches et combien pour les pauvres. L’ONG Oxfam affirme ainsi que dans la future loi de finances 2018, “les 10 % les plus riches bénéficieront d’une hausse des revenus au moins 18 fois plus importante que les 10 % les plus pauvres”. De son côté, Michel Sapin, ancien ministre socialiste de l’Économie, assure sur Europe 1 que “le bouclier fiscal de Macron est quatre fois plus épais que celui de Sarkozy”. L’accusation de président des riches est un piège mortel pour l’Élysée. Y échapper sera compliqué, mais si les forces d’En Marche s’en sortent, la France en sortira totalement transformée. Sur ce chemin, l’atout du prochain budget est de porter des choix de politique publique en rupture avec l’immobilisme habituel. Rien, comme sous Hollande, pour mettre en révolte le monde de l’entreprise. C’est même le contraire ! Sans doute faut-il prendre ce cru budgétaire 2018 comme une étape marquante pour l’installation dans ce pays d’un climat pro-business. “L’accusation de président des riches est un piège mortel pour l’Élysée. Y échapper sera compliqué, mais si les forces d’En Marche s’en sortent, la France en sortira totalement transformée” En même temps, ce budget témoigne d’une vraie prudence dans la limitation des dépenses publiques. Il surfe un peu trop sur l’embellie conjoncturelle et le gonflement des recettes fiscales pour masquer la persistance des déficits. Or sans baisse significative des dépenses, personne ne croira à une baisse réelle des prélèvements obligatoires (PO) sur le long terme. Nul ne sait où en sera ce dilemme bien français à la fin du quinquennat. Même si Bercy programme un taux de PO en pourcentage du PIB passant de 44,3 % en 2018 à 43,6 % en 2022. Pour comprendre la logique qui gouverne les arbitrages de Bercy, il faut revenir aux fondamentaux de la pensée Macron. Dans ‘Révolution’, le futur chef de l’État écrit : “nous avons été très généreux sur les aides sociales, mais nous ne nous sommes jamais attaqués aux racines du chômage de masse. Nous avons soutenu les aides au logement, sans nous préoccuper suffisamment de construire. En somme, nous avons construit un modèle de dépenses palliatives plutôt que de dépenses productives. Aujourd’hui ce modèle est à bout de souffle”. “Nous avons construit un modèle de dépenses palliatives plutôt que de dépenses productives. Aujourd’hui ce modèle est à bout de souffle” Ce qui n’a pas empêché les “palliatifs” de tous bords de donner de la voix contre tout déplacement des curseurs dans la destination et le niveau des subventions. La séquence estivale sur les contrats aidés et l’APL (Aide personnalisée au logement) l’a amplement démontré. La présentation de la loi de finances 2018 va-t-elle permettre de tourner la page et d’avancer les pions de la réforme ? Elle est bâtie autour de la conviction très rocardienne, et macronienne, que la création de richesse précède la distribution et, pourrait-on ajouter, la taxation. “Nous sommes pour une économie de la création”, proclame Bruno Le Maire, ministre de l’Économie. Toutes les statistiques font état du retard des PME tricolores en équipements en robots et du tropisme américain des start-up. Pour les analystes, la faute en revient au matraquage fiscal des revenus du capital. En 2017, leur taux d’imposition atteint 44 % en France contre 28,5 % aux États-Unis, 26,4 % en Allemagne, 26 % en Italie, 23 % en Espagne (source OCDE, Natixis). De quoi justifier le changement de cap.